Né en 1954, ingénieur des Mines de Saint-Etienne, j'ai été informaticien toute ma vie professionnelle. Après un début en société de services, j'ai travaillé dans l'informatique de Carrefour (Promodès avant sa fusion avec Carrefour) en interne puis comme prestataire IBM jusqu'à ma retraite officielle en 2017. Je vis actuellement en Saône et Loire à côté de Mâcon.

En 2001, ma mère Édith Renouleau vit  dans un appartement situé sur les hauteurs de Toulouse (colline de Jolimont). Elle est témoin de l’explosion de l’usine AZF (1)  et l’a relaté dans ses souvenir écrits.

Edith Renouleau Balcon 1981

Édith Renouleau au balcon de son appartement en 1981

L’explosion

J’étais à mon bureau en train d’écrire. J’ai entendu une première explosion assez forte, mais qui m’a seulement fait lever le nez une seconde. Très vite, après 8 secondes parait-il, une seconde explosion m’a littéralement fait sauter de ma chaise. Je n’exagère pas en disant que de ma vie, je n’avais jamais entendu un bruit d’une pareille intensité, même pendant la guerre où les batteries de DCA ambulantes faisaient un bruit assourdissant, même pendant les pires bombardements.

Cette fois-ci, c’était pire. J’ai cru que quelque chose avait sauté dans le quartier près de chez nous et me suis précipitée sur le balcon pour voir où c’était. Grande fut ma stupéfaction en constatant que tous les immeubles aux alentours étaient intacts. Je n’étais pas seule, il y avait du monde partout aux fenêtres, aux balcons, dans la rue, de gens qui comme moi voulaient savoir ce qui s’était passé.

C’est à ce moment-là que j’aperçus à l’horizon, au sud-ouest, une fumée noire qui s’élevait lentement dans le ciel, puis se dirigeait tout aussi lentement vers le centre-ville.

Immédiatement, je fus persuadée que quelque chose avait explosé à la « Poudrière ». Je connaissais ce lieu de nom et savais plus ou moins vaguement ce qu’on y faisait depuis qu’un de mes patients m’en avait parlé. Il y avait travaillé plusieurs années.

 

Suite à l’explosion

Au même moment, je recevais 2 coups de téléphone, l’un de ma fille qui travaillait au centre-ville et qui venait me rassurer. Elle n’avait rien, mais autour d’elle, toutes les fenêtres avaient les vitres cassées. Le second appel venait de Cécile. Elle me décrivit la panique qui s’était emparée des habitants, mais surtout le contraste étonnant qui existait entre les appartements situés vers l’ouest, comme le sien, qui n’avaient rien, et ceux situés vers l’est dont toutes les vitres étaient par terre, ainsi qu’une grande partie des huisseries.

 

Ce n’est que plus tard, grâce à la radio et à la télé, qu’on apprit l’étendue des dégâts et surtout des victimes, le nombre de victimes, 30 morts aux dernières nouvelles.

C’est le chiffre officiel donné, maintenant, et un nombre inconnu de blessés, beaucoup atteints par des chutes de murs, des éclats de verre, et également des troubles auditifs graves dus à la déflagration.

 

Je me rends sur les lieux une semaine plus tard seulement, ne désirant pas ajouter à la confusion par ma présence, mon âge m’interdisant d’apporter une aide quelconque.

Je me contentais d’envoyer de l’argent à une caisse qui avait été créée pour acheter des choses de première nécessité aux sinistrés. Également, je donnais mes coordonnées à un organisme municipal puisque j’avais une chambre libre pour 1 ou 2 personnes. Curieusement, à ma grande surprise, personne ne me contacta.

 

 

Écrit par Édith Renouleau

 

Commentaire

On a là un témoignage direct.  Le bilan humain de cette catastrophe a été in fine de 31 morts, et deux mille cinq cents blessés. Il y a eu de lourds dégâts matériels. On n’a jamais pu déterminer avec exactitude ce qui s’était passé ce jour-là et la raison de l’explosion.

L’hypothèse d’une explosion préalable à la SNPE (Société Nationale des Poudres et Explosifs) qui jouxtait l’usine AZF a été avancée par certains. Il y a eu une controverse là-dessus. Cela n’a cependant pas été prouvé. Pourtant, plein de témoins l’ont entendu. Maman en fait partie. La colline de Jolimont où elle habitait est assez loin d’AZF : plusieurs km à vol d’oiseau. Le fait qu’elle ait entendu aussi fortement cette explosion donne une idée de sa puissance.  

 

Michel Renouleau – 23/12/2021

Ressource