Né en 1954, ingénieur des Mines de Saint-Etienne, j'ai été informaticien toute ma vie professionnelle. Après un début en société de services, j'ai travaillé dans l'informatique de Carrefour (Promodès avant sa fusion avec Carrefour) en interne puis comme prestataire IBM jusqu'à ma retraite officielle en 2017. Je vis actuellement en Saône et Loire à côté de Mâcon.

Le premier tour de la présidentielle 2022 vient de s’achever (1). Les 2 candidats déjà en tête en 2017, Marine le Pen et Emmanuel Macron, le président sortant, sont à nouveau devant. Ils concourront pour le 2ème tour. Le troisième, Jean-Luc Mélenchon arrive  de peu derrière Marine le Pen. La gauche, une nouvelle fois, est éliminée du 2ème tour. Tous les autres candidats sont loin derrière. Notons aussi que les 2 représentantes des principaux partis ayant gouverné la France depuis 1958, LR et le PS, se sont pris une déculottée historique.

La campagne du premier tour a été très terne. À l’automne, les médias ont outrageusement parlé d’Éric Zemmour qui a décollé dans l’opinion avant de retomber comme un soufflé. La plupart des candidats ont fait preuve de beaucoup de légèreté par des promesses démagogiques, parfois jusqu’au ridicule. J’ai été frappé par le peu de curiosité des journalistes qui les relayaient  : ils ne posaient pas la question qui fâche : « comment pensez-vous financer tout cela ? ».

Aucun candidat n’a eu l’air de se soucier de la montagne de dettes de la France. Ces dettes ont bien gonflé ces 5 dernières années. Une bombe à retardement est devant nous. On aura aussi soigneusement évité, comme par hasard, de trop parler du bilan du présidant sortant. Cela valait mieux, cela aurait fait baisser son score !

 

Un choix ardu

Disons-le tout net, le choix du 2ème tour de la présidentielle 2022 n’apparaît pas très enthousiasmant.

Marine Le Pen –  le retour

Chacun sait les origines de Marine Le Pen. Elle s’est attachée à gommer tous les aspects de son programme qui pouvaient faire peur. Elle a mis en avant des tas de promesses populaires qui flattent autant par leur démagogie que par leur inapplicabilité apparente. Comme on dit souvent : « on n’attrape pas les mouches avec du vinaigre ». Elle n’y est pas allée avec le dos de la cuiller côté promesses sociales. Elle n’a pas été avare non plus dans toute sa carrière récente et dans la campagne d’attaques personnelles. Donc a priori, si je me réfère aux critères de choix d’un bon candidat (CF mon précédent article sur la présidentielle), ce devrait être éliminatoire. Mais ce n’est pas mieux, voire pire de l’autre côté.

 

Le président sortant

Le bilan du président

En face de Marine le Pen, le président sortant Emmanuel Macron, n’est pas bien reluisant. Il a démontré pendant ses 5 ans de présidence une pratique solitaire du pouvoir qui s’est révélée très nocive pour le pays et la démocratie. Il a été clivant dès le départ. Certains le haïssent comme il est n’est pas permis; d’autres le portent aux nues. On ne peut pas lui dénier une certaine habileté politique.

Il s’est attaché à faire oublier son mauvais bilan pour qu’on n’en parle pas. Mine de rien, il a aussi favorisé les extrêmes qui n’ont jamais été aussi hauts dans le pays. Il espérait bien avoir Marine Le Pen en face de lui et a réussi sur ce plan. Ainsi, pense-t-il, le réflexe républicain contre l’extrême droite jouera une fois de plus, et il sera réélu.  Mais ce calcul cynique, cette couillonnade comme cela apparaît de plus en plus, pourrait bien ne pas marcher cette fois-ci. Il aurait alors joué à l’apprenti sorcier.

Son bilan n’est pas bon, quoiqu’il ait essayé de nous faire croire. En 2017, il promettait de changer le pays. En 2022, rien n’a changé sur le fond, le pays est divisé comme jamais. Son attitude est directement responsable de la crise des Gilets Jaunes. Il n’a pas fait grand-chose en 5 ans de pouvoir, sinon beaucoup parler. Il a  dépensé sans compter. Sa propagande est fort bien faite : il parle très bien, et a pas mal de médias dans sa poche. Cela peut faire illusion si on ne réfléchit pas et si on se laisse prendre à ses belles paroles.

Ce qu’a révélé la gestion de la crise du Covid

Emmanuel Macron a mal géré la crise du Covid (CF article Covid – les chiffres ne mentent pas) vu que la France ne s’en est pas très bien sortie malgré des mesures ruineuses. La France termine la crise du Covid sur les rotules au niveau financier : notre déficit 2021 (2) atteint 6,6% du PIB avec un endettement à 113% du PIB, et 128 milliards de dépenses supplémentaires.

De plus, il y a montré un manque de scrupules évident. Son attitude et ses lois discriminatoires contre les personnes non vaccinées du Covid ont été choquantes. Il les a même accusées d’être irresponsables parce qu’elles ne voulaient pas se faire vacciner. L’échec de la vaccination de masse qu’il a promu a montré combien ce discours était fallacieux.  Les lois sur le pass sanitaire et le pass vaccinal, outre leur peu d’intérêt sanitaire, ont été aussi une atteinte grave aux libertés.

Il a bien agité les peurs comme quand il a prédit 400 000 morts du Covid en octobre 2020 si on ne se reconfinait pas. Pire, il a  aussi fait sans vergogne lors de la loi sur le pass sanitaire de juillet 2021 le contraire de ce qu’il affirmait haut et fort 3 mois auparavant. On ne peut avoir aucune confiance dans sa parole :  il ne parle qu’en fonction de ses intérêts du moment.

Dernières sucreries

Dans ce contexte, on peut relever les dernières sucreries distribuées juste avant les élections comme par exemple la baisse subventionnée du prix de l’essence. Tout cela est évidemment financé à crédit, c’est un argent qu’on n’a pas. Augmenter un peu plus la dette, ce n’est pas grave, pense-t-il, du moment que c’est populaire et que cela caresse l’électeur dans le sens du poil au bon moment.

Le pire est que cette politique de facilité pourrait marcher à court terme. Mais cela lui présagerait ensuite des lendemains fort difficiles pour son nouveau mandat, vu la détestation qu’il suscite. Cette détestation ne peut que s’accroître avec le temps si ses pratiques ne changent pas. Ça n’en prend pas le chemin pour le moment.

 

Analyse de l’abstention

Le constat de l’abstention

Les chiffres officiels de l’abstention au premier tour de la présidentielle 2022 sont de 26,31 %. À première vue, on pourrait se dire que ce n’est pas énorme. Certes, on n’atteint pas le record inouï des régionales 2021 où on avait compté près de 67% d’abstentions. Mais la tendance n’est quand même pas bonne, il n’y a qu’en 2002 qu’il y a eu plus d’abstention à une présidentielle.  L’abstention croit fortement depuis quelque temps.

Beaucoup de gens se sentent de moins en moins concernés. Plutôt que de s’indigner contre eux, il serait préférable d’en rechercher les raisons profondes.  Il s’agit là d’un symptôme qui montre que notre démocratie va de moins en moins bien. Et cela a bien empiré sous le dernier mandat, un signe de plus qui devrait alerter.

 

Causes de l’abstention

Beaucoup, particulièrement parmi les jeunes, ont la conviction que le vote ne sert à rien, et qu’il ne changera rien par la suite. Ce n’est pas entièrement faux.  Le scrutin majoritaire, s’il permet de dégager des majorités claires, a aussi tendance à renvoyer ceux qui ont perdu aux oubliettes. Cela leur donne ainsi l’impression que leur vote n’a servi à rien.

Le candidat élu se comporte ensuite malheureusement trop souvent comme un petit dictateur. Il se croit autorisé, parce qu’il a gagné, à faire tout ce qu’il veut pendant 5 ans et à mépriser les oppositions. Cela ne donne pas de très bons résultats en pratique. L’élection ne devrait pas dispenser l’élu de pratiquer la démocratie au quotidien, en veillant à faire participer un maximum de gens à l’élaboration des décisions en dehors de l’élection. Si on fait tout le contraire comme depuis 5 ans, les gens se mettent dans le meilleur des cas en retrait. Souvent, cela conduit à des mouvements de rue violents, voire à des révoltes.

Le spectacle de gens qui n’arrêtent pas de dire du mal les uns des autres, et de faire des promesses aussi mirifiques qu’illusoires, n’arrange rien. Les médias gangrénés par l’argent jouent de moins en moins leur rôle de 4ème pouvoir et de plus en plus celui de courroie de transmission du pouvoir en place.  Beaucoup de gens ont la conviction que les candidats ne parlent pas des vrais problèmes. Ils ont le sentiment qu’on se moque d’eux. En conséquence, ils ne veulent pas cautionner ce système en y participant.

Nicolas Sarkozy porte une lourde responsabilité dans ce processus lorsque suite à son élection en 2007, il a méprisé le résultat du référendum sur l’Europe de 2005. 55% des votants avaient rejeté la constitution européenne. Il a fait ratifier par le parlement le traité de Lisbonne en 2007 qui en reprenait pratiquement toutes les dispositions. Beaucoup de gens ont ressenti cela comme une trahison du suffrage universel, et l’envolée de l’abstention date de cette époque.

 

Comment faire diminuer l’abstention ?

La diminution de l’abstention n’arrivera qu’à partir du moment où la pratique de la démocratie au quotidien ne sera plus un vain mot. Alors, plus de gens s’intéresseront, car ils auront l’impression que leur vote sert à quelque chose.

 

Conclusion

Entre les deux candidats du second tour, je vais avoir du mal à choisir.  On dit souvent qu’au premier tour on choisit et qu’au deuxième tour, on élimine. Je n’ai pas encore décidé à ce jour qui je vais éliminer, même si je suis sûr de voter. Si je vote pour l’un des deux, ce sera pour celui ou celle que j’aurai jugé le moins nocif pour le pays, en espérant qu’il sera un tout petit peu mieux que l’autre candidat et que je ne le regretterai pas amèrement par la suite. Je pourrais aussi très bien voter blanc si je juge qu’ils sont dos à dos, la peste et le choléra, pour reprendre une formule célèbre.

Je trouve que déjà que la campagne commence très mal d’un côté. Dimanche 10 avril au soir, il y avait par exemple un débat sur une chaîne d’info où l’un des deux candidats n’était pas représenté. Lundi 11 avril, j’entends un autre débat où on n’a fait qu’agiter les peurs sur le programme de l’autre candidat, sans rien dire du programme de son propre candidat. Un condensé de négativité qu’on aimerait voir cesser tout de suite.

On parle souvent de la reconnaissance du vote blanc, sans jamais, comme par hasard, préciser ce qu’on entend par là. Personnellement, je verrais bien un système où une élection pourrait être invalidée si l’abstention et le vote blanc dépassent un certain pourcentage, comme par exemple pour les dernières régionales. Aucun des 2 candidats n’en parle, et c’est bien dommage. On attend aussi plus de propositions de la part de chacun des candidats pour revivifier la démocratie au quotidien et intéresser les jeunes. Le RIC (référendum d’initiative citoyenne) et l’instauration d’un peu de proportionnelle vont dans le bon sens. Cela ne suffit pas cependant, et les actes devront suivre les promesses.

 

Miche Renouleau – le 12/04/2022

 

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